La Commission de l'Océan Indien a fait de l'intégration régionale son objectif principal. Contrairement à ce qu'on peut penser, l’Indianocéanie se trouve en Afrique. Ce néologisme géographique, employé pour la première fois en 1960 par l’écrivain mauricien Camille de Rauville, est désormais concrétisé et c'est Jean Claude de l’Estrac, secrétaire général de la Commission de l’Océan Indien (COI) depuis 2012, qui en est l'ambassadeur.
L’Indianocéanie s’étend le long des côtes du Mozambique sur un peu plus de 5 millions de km² et englobe les Comores, Madagascar, ainsi que les anciennes Mascareignes françaises, les Seychelles, Maurice et La Réunion.
Un ensemble disparate, constitué d’États indépendants et de dépendances, de pays développés et en développement, aux religions et aux traditions aussi multiples et variées que la provenance des vagues successives de peuplement poussées vers ces îles par les moussons ou les courants marins. Le plus souvent de leur plein gré, mais parfois contraintes et forcées, comme pour les esclaves noirs et les coolies du sous-continent indien, exploités dans les plantations de cannes à sucre. Malais et Indonésiens à Madagascar, Bantous et Perses aux Comores, Indiens dans les Mascareignes, Chinois un peu partout, tous ont contribué à dessiner ce métissage devenu, au fil des siècles, un patrimoine commun à l’ensemble de la sous-région.
Tout comme l’usage du français, hérité de l’ancien colonisateur et qui sert de langue véhiculaire dans toute la zone. Même les différents créoles mauriciens ou seychellois, bien que mâtinés d’anglais, utilisent majoritairement les bases lexicales de la langue de Voltaire pour faire de l’Indianocéanie un îlot de francophonie dans un Océan Indien perçu comme un lac anglophone.
C’est en s’appuyant sur ce type de similitudes que la COI espère sublimer les différences et dépasser les vieux contentieux pour mieux fédérer les États et construire cette identité commune qui leur permettra de faire face, ensemble, aux nombreux défis qui les attendent, de la lutte contre le terrorisme à celle contre le réchauffement climatique.
Car bien que située, en apparence, aux marches du monde, la sous-région est rattrapée par la mondialisation économique en cours, grâce notamment aux routes maritimes qui sillonnent depuis toujours et en tous sens cet espace de plus en plus géostratégique, à mesure qu’explosent les échanges en tout genre entre l’Asie et l’Afrique.
La France l’a bien compris. Membre de la COI par l’intermédiaire de La Réunion et, de très loin, son premier contributeur, Paris voit dans la Commission un bon moyen d’exercer son influence dans cette zone de confluence. La présence de François Hollande lors du quatrième sommet des chefs d’État, à Moroni, en août 2014, avait justement pour but de rappeler l’engagement de la France dans cette organisation, également suivie avec beaucoup d’attention par d’autres grandes puissances. Les États-Unis y sont militairement présents avec leur base de Diego Garcia, installée dans l’archipel des Chagos. La Chine est le premier pays à avoir obtenu le statut d’observateur de la COI en mai dernier, et l’Inde pourrait rapidement lui emboîter le pas.
En quelques années, la COI a réussi à s’imposer comme la traduction politique d’une identité indianocéanique en construction, destinée à servir de moteur à une véritable intégration sous-régionale. Une première étape qui en demande d’autres, pour qu’un jour puisse être constituée cette fameuse communauté que beaucoup appellent de leurs vœux.
Créée en 1982 à Port-Louis et institutionnalisée deux ans plus tard par l’accord de Victoria, la Commission de l’océan Indien (COI) est la seule organisation régionale d’Afrique constituée uniquement de territoires insulaires.
Elle réunit à ses débuts l'Île Maurice, Madagascar et les Seychelles, rejoints en 1986 par les Comores et la France par l’intermédiaire de La Réunion, avec pour principale mission de resserrer les liens culturels, mais également politiques et économiques, entre ses cinq pays membres.
Elle défend également leurs intérêts sur la scène régionale et internationale. Si les chefs d’État se retrouvent lors de sommets organisés plus ou moins régulièrement (quatre en trente-deux ans), leurs ministres des Affaires étrangères se réunissent chaque année pour déterminer les priorités dont le secrétariat général, véritable organe exécutif, aura la charge.
Pour renforcer l’intégration régionale, la COI conduit des projets liés à l’économie et au commerce, à l’environnement et au changement climatique, à la mobilité et à la connectivité. Son champ d’action s’est graduellement élargi vers le champ diplomatique, avec les missions d’observation aux Comores en 1997, puis à Madagascar, lors de la sortie de crise, en 2013, et, plus récemment, lors du scrutin présidentiel de février.