La finance est sans doute un des premiers secteurs marqués par la globalisation. Dans le monde de marchés libres, les décisions financières se prennent à quelques détails près, sur les mêmes critères. Par conséquent, il n’y a pas de différences fondamentales entre un investisseur américain et européen au niveau du raisonnement et du rationnel. Tous cherchent à maximiser leur retour sur investissement. En revanche, on observe des différences sur les pratiques, notamment liées aux spécificités réglementaires et culturelles locales.
Une première différence émane d’une liquidité plus abondante aux Etats-Unis. Les montants levés notamment par les fonds LBO américains ont atteint des niveaux record. Ces fonds doivent maintenant être déployés, c’est-à-dire investi dans des sociétés, ce qui augmentera encore la concurrence entre les fonds pour mettre la main sur les sociétés à fort potentiel. Cette abondance de capital s’amplifie par une abondance de dette, résultant de taux d’intérêts bas et une forte concurrence entre les banques pour financer les opérations de fusion-acquisition. Cette abondance – ou excès – de liquidité exerce naturellement une influence certaine sur l’accès au capital, et sur la valorisation des sociétés lors des opérations de cession.
Une deuxième différence émane de ce qui est moralement, socialement et politiquement acceptable sur les deux continents. Les Etats-Unis sont le berceau du capitalisme. C’est un pays fondamentalement libéral, où l’on fait le culte de la réussite financière. En Europe continental, et en particulier en France, le rapport que l’on a avec l’argent et la réussite financière est différent et le social joue un rôle important dans la prise de décisions, notamment de fusions et acquisitions.
Prenons l’exemple d’un fonds LBO américain procédant une acquisition de $100m. Il investit typiquement $15m à $20m en capital et finance le reste de l’acquisition par de la dette. A la première occasion, la société cible fera un emprunt – disons de $15m – et versera un dividende exceptionnelle de $15m à son actionnaire, le fonds LBO. Le fond récupère donc la totalité de son capital investi et aura donc ainsi financé la totalité de l’opération par de la dette.
De telles opérations sont courantes aux Etats-Unis. Peut-être qu’elles se pratiquent également en France, de manière plus modérée. En tout les cas, on est très loin du politiquement acceptable.
Une troisième différence émane de l’attitude que l’on a vis-à-vis du risque. De manière générale, les investisseurs américains sont plus disposés à prendre des risques que leurs confrères européens. On pourrait dire qu’ils sont plus sensibles au potentiel de développement d’un projet qu’au risque de perdre leur capital. Un exemple parlant est la traduction du terme venture capital en capital risque. Le terme venture a effectivement deux significations : 1- projet, entreprise ; 2- risquer, hasarder. Il paraît assez évident que le venture capital veut dire financer de jeunes entreprises et des projets d’entreprises, et cela ne veut pas dire – contrairement à ce que le nom capital risque peut laisser entendre – un investissement risqué. Un investisseur européen a tendance à privilégier la conservation de son capital initial au potentiel de multiplication du capital investi.
Lorsqu’il s’agit de levée de fonds, notamment dans les secteurs de la technologie, l’entrepreneur français se retrouve donc avec un désavantage concurrentiel important. En effet, non seulement il a plus difficilement accès au capital, mais surtout il a accès à beaucoup moins de capital. Par ailleurs, les fonds américains s’intéressent de plus en plus à des opportunités d’investissement à l’international, notamment en Inde et en Chine, mais aussi en Europe. Le phénomène est encore relativement peu rependu en France, mais on constate que de plus en plus de sociétés européennes à fort potentiel de développement se font financer par des fonds américains. Or la France est particulièrement bien réputée pour la qualité de ses écoles d’ingénieurs et pour les travaux de ses chercheurs.
Pour susciter l’intérêt des fonds américains, il faut « packager » l’entreprise de la bonne façon et il y a de nombreux ouvrages ou expert sur ce sujet, en gardant à l’esprit qu’un fonds d’investissement agit selon une stratégie d’investissement précise, dans le cadre un mandat de gestion qui lui a été confié par ses propres investisseurs.
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