Entretien avec le président de l'Association of Trust and Management Companies - Monsieur SHAHED HOOLASH
Jusqu’à présent, il n’y a pas eu beaucoup de départs de clients en raison de la liste noire, n’empêche, il se peut que les investisseurs cherchent des alternatives à Maurice pour les nouvelles structures, observe le président de l’ATMC.
En dépit des réformes initiées par Maurice pour s’aligner sur les meilleures pratiques internationales, il se retrouve aujourd’hui sur la liste noire de l’Union européenne. A-t-on les cartes en main pour convaincre les investisseurs ?
Par souci de clarté, il n’y a aucun lien entre la liste grise du GAFI et la liste noire de l’Union européenne, qui relève davantage de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, et de la question de la compétence en matière de substance et de pratiques fiscales dommageables.
Nous devons comprendre que les traités fiscaux existent pour promouvoir le commerce et l’investissement entre deux nations souveraines. Ils sont conclus en fonction d’un contexte politique et économique spécifique. En conséquence, les pays concluront, renégocieront et résilieront les conventions fiscales en fonction des besoins du moment.
De nombreuses conventions fiscales conclues par Maurice avec d’autres pays partent du principe que ces pays se trouvent dans une phase de leur développement économique où leur seule priorité est d’attirer des capitaux pour financer leur croissance économique et qu’ils sont donc prêts à accorder des incitations fiscales pour attirer des capitaux. Ces conventions étaient basées sur le modèle de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). À mesure qu’ils progressent sur la voie de la croissance et de la sophistication, ils deviennent attractifs en tant que destination d’investissement. Ils n’ont donc plus besoin d’accorder des incitations fiscales et de renégocier leurs conventions fiscales en conséquence.
Maurice a déjà modifié toutes ses conventions par le biais de l’instrument multilatéral de l’OCDE, où il n’y aura pas de non-double imposition et où le chalandage de conventions fiscales (treaty shopping) est interdit. Il existe désormais un mécanisme qui permet à nos partenaires de refuser les avantages de la convention si celle-ci sert principalement à éviter l’impôt.
«Notre modèle commercial devra évoluer»
Cela aura pour effet de garantir que seules les entreprises ayant une raison d’être et une substance commerciales appropriée pourront utiliser Maurice, puisque nous avons mis en place des exigences en matière de substance, comme l’exige l’OCDE.
En tant que régulateur du secteur non bancaire, la Financial Services Commission (FSC) n’a pas la responsabilité d’attirer les investisseurs. Cela relève davantage de l’Economic Development Board. La FSC peut néanmoins faire beaucoup pour que les investisseurs se sentent à l’aise à Maurice.
Quelles sont les juridictions concurrentes qui devraient profiter du «blacklisting» de Maurice ?
Nous opérons dans un environnement concurrentiel et jusqu’à présent, nous n’avons pas vu beaucoup de clients partir en raison de la liste noire. Il se peut que les clients cherchent des alternatives à Maurice pour les nouvelles structures. Mais étant donné le contexte économique actuel, les affaires sont globalement lentes et Maurice ne fait pas exception à la règle. Notre espoir est que nous sortirons de la liste grise du GAFI et de la liste noire de l’UE le plus rapidement possible.
Comment bâtir la résilience du global business ?
Notre modèle commercial devra évoluer conformément aux exigences des organismes de normalisation mondiaux. Nous ne pouvons pas garder l’idée que ce qui a fonctionné hier et fonctionne aujourd’hui, fonctionnera demain. Il existe un mouvement mondial et nous devons rester en tête en examinant sérieusement notre modèle et en décidant de la direction à prendre.
Le respect des réglementations internationales reste l’exigence primordiale, dans le cadre de laquelle nous devons construire notre niche pour nous rendre pertinents à la fois pour nos investisseurs et pour les entreprises dans lesquelles nous investissons. Cela ne pourra se faire qu’avec un partenariat public/privé solide pour faire passer ce secteur à un niveau supérieur.
Source: Business magazine