Les discussions menées entre le gouvernement et les commissaires aux comptes patinent. Point d'achoppement : les modalités de la période transitoire proposée lundi par le rapport de Cambourg.
Les commissaires aux comptes avaient placé tous leurs espoirs dans la mission sur l'avenir de la profession confiée mi-avril par Bercy et le ministère de la Justice au président de l'Autorité des normes comptables (ANC), Patrick de Cambourg. Depuis que le relèvement des seuils déclenchant l'obligation de recourir à un commissaire aux comptes pour une PME est prévu dans la loi Pacte, ils vivent dans l'angoisse de perdre un quart de leurs mandats.
Ce lundi, le rapport de Cambourg a été rendu aux ministres. « Le pire a été évité pour les commissaires aux comptes », note un proche du dossier. Mais, selon nos informations, les modalités techniques de la mise en oeuvre du rapport sont discutées actuellement par Bercy et la Chancellerie. Plusieurs réunions ont déjà eu lieu entre les différents protagonistes, dont une, jeudi soir, mais elles n'ont encore abouti à un accord.
Une période transitoire de trois ans
Le rapport, que « Les Echos » se sont procuré, propose essentiellement une période transitoire de 3 ans entre l'ancien dispositif et le nouveau. Les mandats en cours seraient interrompus à l'issue du premier exercice clos après la promulgation de la loi (soit 2019). Toutes les entreprises concernées par cette interruption devraient alors choisir entre la réalisation d'un audit légal Petite Entreprise (PE) et le maintien d'un commissariat aux comptes classique, pendant trois ans. L'audit légal PE consisterait en un audit allégé, avec la délivrance d'une attestation de sincérité et de régularité comptables, la remise d'un rapport prospectif sur les risques de l'entreprise et la délivrance d'attestations spécifiques à valeur ajoutée.
A l'issue des trois ans, le nouveau dispositif prévu par la loi Pacte s'appliquerait. Les PME en deçà du seuil de 8 millions de chiffre d'affaires n'auraient plus aucune obligation de recourir à un commissaire aux comptes mais elles pourraient le faire de manière volontaire.
La mission de Cambourg a considéré que cette mesure plaçait entreprises et professionnels sur un pied d'égalité en éliminant les conséquences liées à l'échéance des mandats en cours qui peut aller jusqu'à six ans et qui est par construction aléatoire et répartie dans le temps.
Pour les commissaires aux comptes, cette mesure est indispensable.« Si elle était remise en question, cela ferait repartir le conflit avec la profession » prévient Jean Bouquot, président de la CNCC (Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes). Elle permet en tout cas un compromis équilibré, tenant compte de la diversité des durées restantes des mandats en cours. « La plus grande crainte des commissaires aux comptes est que les relèvements de seuil s'appliquent tout de suite, et que les mandats meurent au fur et à mesure du temps qu'il leur reste », indique un proche du dossier.
«Cette proposition leur permettrait de rebondir. Le défi serait alors de démontrer aux PME qu'ils sont vraiment indispensables. Cela responsabiliserait la profession. Et ils auraient trois ans pour le faire », ajoute-t-il.
Du côté du gouvernement, selon nos informations, on est d'accord sur le fait qu'une période de transition est nécessaire mais pas forcément de trois ans. « On sera juste avant les élections présidentielles », indique-t-on. Une période peu propice aux réformes. On discute des modalités. Interrompre tous les mandats en janvier 2019 poserait notamment de sérieuses questions juridiques et soulèverait des difficultés opérationnelles.
Obligatoire pour société faîtière d'un groupe
Le rapport propose aussi de rendre le commissariat aux comptes obligatoire pour la société faîtière d'un groupe même si elle se trouve en deçà des seuils. Ce dès que l'ensemble du groupe se situe au-delà des seuils. Un audit légal PE devrait être réalisé pour les filiales importantes, celles dont le chiffre d'affaires dépasse les 4 millions d'euros.
Source: LesEchos.fr